L'église romane d' ÉCHILLAIS en SAINTONGE Texte intégral de Charles CONNOUË Commune du Canton de saint-Agnant (à 4 kilomètres au Nord de Saint-Agnant et à 25 kilomètres de Saintes) Le village d'ECHILLAIS possède une des célèbres églises romanes qui ont fait la renommée de la Saintonge. Par la forme particulière de sa façade elle éveille d'abord l'attention par sa très riche et très importante décoration, elle la retient ensuite et la fixe. Lesson qui est à l'origine de bien des erreurs archéologiques, mais qui a beaucoup vu, a su exprimer à son propos quelques vérités certaines. De cette église qu'il avait longuement admirée, non loin de laquelle il avait passé une grande partie de sa vie et qu'il connaissait bien pour " en avoir dessiné toutes les pierres ", il disait qu'elle était " un bijou à mettre sous verre ." Cet éloge imagé, peut-être excessif dans son expression, n'est pas immérité. ECHILLAIS est une des plus belles créations romanes de notre province. Elle a d'ailleurs été classée aux Monuments Historiques dès 1840.
Sa façade carrée la place dans
la catégorie très réduite des églises en forme d'arc
de triomphe.Une première corniche la coupe verticalement
en deux parties égales et chacune de ces parties est
elle-même divisée en deux par un bandeau continu
courant d'une extrémité à l'autre à hauteur des
tailloirs des chapiteaux. Au rez-de-chaussée s'ouvre un
large et très beau portai! en plein-cintre accompagné
de deux baies aveugles dont il est séparé par de
massives et courtes colonnes. Celles-ci surmontées d'un
volumineux chapiteau à la hauteur du sommet des pieds-droits
se continuent par deux colonnes accolées plus petites
montant jusqu'à la corniche. Des groupes de colonnes
semblables se dressent à chaque extrémité de la façade. Le cintre du portail, pièce maîtresse de cet ensemble, est malheureusement très mutilé du fait des intempéries et... du marteau. Sur la grande voussure, qu'encadre un cordon à pointes de diamant, se déroule une scène de l'apocalypse : le triomphe du Christ. Un Christ nimbé présente un Agneau à six personnages. Au-dessus de la tête du Christ est écrit le mot IESUS et l'un des personnages de gauche a la tête en bas (sans doute un ange déchu). Sur la deuxième voussure On distingue une lapidation. Le martyr à genoux et mains jointes semble prier. A côté, un personnage une pierre à la main en tient d'autres dans son tablier. La troisième voussure n'est plus discernable et le cintre de la porte qui a d'ailleurs probablement remplacé une voussure historiée détruite, est sans ornement. Nus également les deux arcs des baies aveugles qui sont cependant accompagnés chacun d'un cordon à feuilles de laurier. Mais tous les chapiteaux, les quatre des grosses colonnes, ceux des dix colonnes des pieds-droits, les tailloirs et le bandeau qui les réunit sont ornés à profusion, de feuilles, de fleurs, de dragons et de sujets divers où se distingue notamment une grosse tète de démon qui avale une colonne. Les pleins des baies aveugles sont appareillés en zigzag et les socles eux-mêmes, où s'appuient les quatre groupes de doubles colonnes, sont richement décorés. Une épaisse corniche montée sur modifions, mais qui surprend par sa grande simplicité termine cette belle page d'architecture du XIIe siècle. Sur cette corniche s'élève l'étage. Il est plus orné encore que le rez-de-chaussée et la qualité supérieure de ses sculptures oblige à penser à deux époques ou à deux ateliers... Une magnifique arcature à 9 cintres (le 5e plus grand encadre seul une fenêtre (percée) déroule ses superbes archivoltes appuyées sur 14 colonnettes monolithes. Cette arcature rappelle celle de la façade de RIOUX. Même cintres outrepassés, même gros chapiteaux et large cordon, même ornementation très fouillée, presque trop chargée et qui frise la lourdeur. Chacun des arcs a reçu un décor différent à base de palmettes, rinceaux, croix, marguerites perlées à 8 branches, ce qui est courant et marguerites à 11 branches, ce qui l'est beaucoup moins. Tout ce qui pouvait être sculpté : archivoltes, cordons, chapiteaux, bandeau l'a été et l'a été avec abondance et talent.
Au-dessus enfin couronnant l'édifice dans toute sa longueur, une admirable corniche, perle de ce " bijou " met le point final à cette harmonieuse oeuvre d'art. La décoration est ici hors de pair, plat, chanfrein, modillons, espaces entre ceux-ci, tout est travaillé de main de maître.
Il existe de belles corniches en Saintonge. Il n'y en a pas de plus parfaites que celle d'ECHILLAIS. Les murets latéraux de la nef reconstruits et percés de longues fenêtres n'ont rien de remarquable. Dans celui du côté Nord est engagé une tour d'escalier circulaire dont le dôme refait ressemble à un couvercle. Le clocher sans style et d'un modèle réduit peu en rapport avec l'édifice, date de la dernière reconstruction de la nef. Les quatre faces de son étage carré sont chacune très évidées par une grande ouverture en plein-cintre. Il se termine par une petite pyramide de pierre. L'abside romane demi-circulaire extérieurement très soignée, surtout la fenêtre axiale, compte cinq baies à cintres sculptés et à chapiteaux. De grosses colonnes, présentant aussi de beaux chapiteaux travaillés, séparent les fenêtres et forment contreforts. L'Intérieur décèle les nombreuses modifications ! survenues au cours des siècles. Toute la partie comprise entre la façade et l'abside, c'est à dire la nef, le transept et le clocher primitif a été abattue au cours des guerres avec les Anglais, qui furent vives dans la région. La nef relevée a subi de nouveaux et graves dommages au XVIe siècle, du fait cette fois des Calvinistes. Reconstruite à nouveau, elle est aujourd'hui à peu près nue et plus étroite que la façade. Son mur de droite a été percé, à la hauteur du chœur et les deux dernières travées de la nef, de trois larges baies en plein-cintre donnant accès à une vaste chapelle seigneuriale. Celle-ci communique par une porte basse ouverte au midi avec une salle de même époque voûtée en pierre sur ogives à huit branches. Des clés diverses portent les millésimes de 1683 et 1696, dates de réparations effectuées quelques cent ans plus tard. Le bénitier est de 1657. L'abside en cul-de-four à trois de ses cinq fenêtres ornées de colonnes à chapiteaux illustrés : animaux, motif de Saint Eutrope, feuillages, pèlerins, évêque. Un bandeau de demi-besants opposés court à hauteur des chapiteaux et s'arrête au choeur. L'église aurait été fortifiée au XVe siècle. Dans la sacristie, ancienne chapelle, voûtée également en ogive, il a été découvert en 1928 sous le plancher, une grande quantité de sarcophages pressés les uns contre les autres. L'un d'eux, trop court avait été coupé au pied et allongé avec trois pierres posées de champ. ÉCHILLAIS est dédiée à la Sainte Vierge sous le titre de l'assomption. ______________________ Fin du texte de Charles CONNOUË Les églises de la SAINTONGE (livre 1 épuisé) édition: R.DELAVAUD (Saintes)______avec leur aimable permission _________________
ou du moins essayons...
"ÉCHILLAIS visite guidée" (document disponible dans l'église) Dans la seconde moitié du XVI ème siècle, les voûtes de la nef et de la chapelle St-Sébastien furent détruites, sans doute vers 1577, lors des Guerres de Religion. Une restauration fut assurée à la fin du XVII ème siècle, ainsi qu'en témoignent les cartouches dans la chapelle et la nef. Ce fut l'oeuvre de Jean BARRAUD, curé de l'époque. Lors de la récente restauration (1970-71) la nef a
retrouvé, en partie, son aspect primitif. Le niveau
actuel est celui du XI-XII ème siècle. A gauche l'un d'eux représente un
personnage assis tenant dans la main droite une crosse,
dans la gauche un livre. Il est encadré de deux hommes
debout. EXTÉRIEUR Nous avons une façade écran offrant un vaste champ
à une riche ornementation. La tête de dragon, dit encore « grand'goule », un des plus beau de la région. Le chapiteau nord, bien qu'en mauvais état, laisse
encore voir une sirène avec des attributs eucharistiques
: dans sa main droite un poisson, et dans la gauche un
pain rond avec une croix. Le tout est coiffé d'une corniche. Guirlande de feuillage soutenue par des modillons ornés de sujets divers : musicien, tireur à l'arc, jongleur, prêtre bénissant, ainsi que d'animaux fabuleux et de masques. Les métopes (intervalle entre deux modillons) ont reçu également une riche décoration : damiers, roues, rosaces.... Le portail est en mauvais état. La voussure supérieure présente le Christ bénissant - l'inscription JESUS l'identifie - entouré de part et d'autre de personnages : femme à la main sur la hanche, joueur de viole... La seconde voussure pourrait être le martyr de St-Etienne. Le martyr est prostré, les mains jointes, au-dessous du Christ. De chaque côté, les bourreaux semblent lui lancer des pierres. La troisième voussure, fort endommagée, permet de distinguer, à gauche, au-dessus du tailloir, un corps extrait d'un tombeau et soutenu par des anges. Ne serait-ce pas une évocation de l'Assomption de Marie ? L'église d’ECHILLAIS est en effet sous le patronage de NOTRE DAME DE L'ASSOMPTION. L'abside est coupée au tiers inférieur par un cordon de sabliers ou double-besants. Quatre colonnes contreforts agrémentent le chevet. Elles se terminent par des chapiteaux très ouvragés (voir colonne nord la colombe avec son rameau dans le bec). La corniche toute simple est soutenue par des modillons ornés de roues, étoiles, visages, animaux extraits d'un bestiaire fantastique. A remarquer les voussures des cinq fenêtres et leurs chapiteaux, en particulier la fenêtre centrale où se distingue une femme « en long bliaud à grandes manches et un homme en tunique courte qui semble danser ". Le côté sud de l'abside comporte un enfeu, en partie maltraité par une construction postérieure dont il ne reste que la base des murs. La terre d'ECHILLAIS a été tenue pendant plusieurs siècles par la famille GOUMARD seigneur d'ECHILLAIS. Le nom de cette famille apparaît pour la première fois en 1090, sur une chartre d'érection en abbaye de l'Eglise Collégiale de Sainte Marie de Taulnay (Tonnay- Charente) « TETBAUDUS COTMARUS » nommé le premier avec plusieurs autres nobles, comme témoins de l'érection en abbaye de moines de l'Eglise Collégiale de Taunay Charente, l'an 1090 Nous pouvons croire que ce fut THIBAUD GOMAR qui fit construire l'Eglise d'ECHILLAIS, cela expliquerait pourquoi il est le seul seigneur, témoin de la fondation, qui n'ait fait aucun don à la nouvelle abbaye." (In Barbotin : ECHIlLLAIS et ses Seigneurs -1933, page 34) La découverte, par l'abbé LE RETIF, curé d'ECHILLAIS lors des travaux de restauration en 1970-71, d'un soubassement (de cul de four) dans la première partie du choeur actuel, viendrait à l'appui de l'hypothèse du chanoine BARBOTIN. " L'église construite au XII ème siècle a très probablement remplacé une plus ancienne dont nous n'avons pas trouvé trace ". (Op. cit. page 24) Cet édifice antérieur - peut-être du IX ème siècle - aurait pu être détruit par les Vikings remontant la Charente. L'Eglise - fin XI ème début XII ème - ne comportait qu'une nef. Les quatre grosses bases de la travée qui précède le ch&oeligur semblent indiquer qu'elles devaient supporter une coupole sous le clocher. Au XIII ème siècle un bas-côté fut édifié au sud c'est la chapelle St SEBASTIEN. C'était une construction gothique comprenant deux travées, plus élevée que la chapelle actuelle, ainsi que l'indique le départ de voûte visible, à l'extérieur sur la place sise au chevet, au-dessus du toit de cette chapelle. L'extérieur du mur sud de cette chapelle du XIII ème siècle était orné d'une corniche soutenue par des modillons que l'on aperçoit un peu toujours de la place du chevet. Dans la première moitié du XV ème siècle, ainsi qu'il ressort du testament de BERTRAND GOUMARD en date du 4 mars 1447 existait une seconde chapelle dite de St-JULIEN, en laquelle il demande à être inhumé, " laquelle mes seigneurs mes prédécesseurs fondèrent autrefois et en laquelle ils ont sépulture". Cette chapelle, actuellement sacristie, abrite sous le ciment qui en constitue le sol, les sarcophages des dits-seigneurs. ___________________________________________________________________________________________ ______________________
F. EYGUN : SAINTONGE ROMANE Ed. du Zodiaque pages 235-237 Chanoine BARBOTIN: ECHILLAIS et ses Seigneurs, Soc. Hist. de Saintonge et Aunis _ 1933 Chanoine BARBOTIN: ECHILLAIS à travers les âges, Soc. Hist. de Saintonge et Aunis _ 1957 G. MUSSET: Découvertes sensationnelles: Echillais et MOËZE, Imp. Noël Texier, 1806 et ce livret: A visiter aux alentours d'ECHILLAIS:
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Voir les sculptures d' ECHILLAIS en album outrepassé
FIN rev: sept 2011/rev avril 2012/vev nov 2015/rev. 2019